YESHOUAH
YESHOUAH
Noël ! Te voilà revenu. Nouvelle
lumière !
Qui me dira ton origine,
L'enchantement de ton mystère ?
Jul, Yeul, Yol, Wheel
Ol, New Heyl, Noël !
Tu es le renouveau, un espoir d’amour.
Car la désespérance se cache dans ta
Joie ...
L'ombre et la lumière en toi
Se marient comme en moi.
Ah! J'en pleure et j'en ris, de la mort,
de la vie;
Jean qui pleure, Jean qui rit.
Noël ! Tu es la plus longue des nuits.
Soudain une lueur apparaît
Dans le profond silence.
Écoute le Christ-Lumière qui avance...
Il est l'Orient du Monde qui marche
Et le son de son Verbe résonne sous
l'arche.
Noël ! te voilà revenu en cette
mystérieuse nuit,
Ni tout à fait le même, ni tout à
fait un autre,
Immuable et changeant comme les vagues
de la mer.
Nuit Mère, nuit amère, au minuit de la
nuit,
Minuit de la Sainte Lucie à
l'Épiphanie,
De ton sein obscur sort une nouvelle
année
Qui s'étire en longueur sur douze mois
entiers.
Noël ! Nuit primitive, profonde et sans
forme,
Nuit de miséricorde, grosse du noir
soleil de minuit,
En toi sommeille le rêve de la
recréation du monde,
Je te le dis Noël, tu illumines ma
nuit.
De la nuit la plus noire au jour le plus
blanc,
Et sous la céleste rosée qui tombe du
firmament,
Le soleil tel un paon fait une roue
arc-en-ciel,
Puis s'éloigne haut et fier au cours de
sa tournée,
Comme un fruit qui mûrit dans la
lumière éternelle.
Épuisant la ronde des saisons, et sans
fin
Celle des réincarnations successives,
De noir qu'il était, le soleil pâlit.
Alors dans le ciel complice
S'opère une étrange alchimie.
Avec l'aurore naissante, le blanc
devient jaune et rosit,
Et bientôt reverdit. Le vert alors se
rubéfie.
Que l'amour vienne et le rouge apparaît,
S'empourpre du crépuscule avec la
Charité.
Le couchant se pare d'indigo, de violine
et de violet.
Puis de nouveau du noir avec la nuit qui
descend.
C'est alors que dans la douce paix du
soir retrouvée,
Le chevalier s'efface derrière
l'écuyer.
Car la voie du Sage est celle de la
Prudence,
Celle de n'avoir parfois plus de voix,
Celle de ne plus éblouir, de ne plus
aveugler.
Il est prêt, il renonce à
lui-même,
Telle est la Règle Suprême du parfait
initié,
Qui disparaît dans le silence et
l'invisibilité.
Noël ! Où t'en vas-tu dans ce silence
noir ?
Es-tu l'espoir lumineux d'un renouveau ?
Toi qui m'écoute sans m'entendre ni me
voir
Je perçois ton murmure comme un
lointain écho.
Tu me dis: " en vérité, mon bien
aimé frère,
La nouvelle lumière que tu reçois de
moi est en toi.
Prends garde qu'elle ne devienne
ténèbres si tu n'aimes pas.
Entre ton corps obscur et ton esprit
rayonnant,
Séjourne, silencieuse, ton âme
féminine;
Exilée et captive, elle cherche à se
libérer
De ton corps trop dense, pulsionnel et
si lourd.
Ne te résigne pas devant la Fatalité.
Ne prends-tu pas conscience que ton Âme
immortelle
Cherche à réintégrer la lumière si
belle
De l'Unité perdue ?
N'en as-tu point conservé le souvenir
ému ?
N'en as-tu point gardé une étrange
nostalgie ?
Secoue la nuit intérieure qui
t'enchaîne à une colonne brisée,
Retourne d'abord à ta nature originelle
et dépouillée,
Éprouve de nouveau le désir de tes
premières nécessités :
Renonce au superflu, à tes désirs d'un
autre âge.
Cela sera Justice. Le pain et l'eau,
voilà le repas frugal du Sage
Pris bien souvent pour un fou tant le
monde est sot.
Renonce au superflu, à tes désirs d'un
autre âge.
Jette loin de toi, le fer, l'airain,
l'argent et l'or ;
Sens, regarde, goûte, écoute, touche,
Mais, perçois au-delà de tes sens, le
monde invisible.
Ne te jette pas dans le plaisir des
sens,
Car là est le secret de la Tempérance".
Mais déjà Noël je n'écoute plus ta
voix.
Car ta voix est devenue la mienne.
Celle de mon âme tour à tour
charnelle,
De mon âme passionnelle et qui aime.
De mon âme que je blâme de trop
s'aimer elle-même.
Et je lutte mais en vain, contre
moi-même,
Le glaive dans une main, de l'autre la
truelle,
Acceptant mes échardes et polissant ma
pierre !
L'ennemi est en moi, obscur démon qui
m'enchaîne,
Adversaire tenace qu'il me faut dominer.
Alors, le héros qui sommeille en moi se
relève
Par les cinq points énigmatiques
Dont les maîtres gardent le secret.
De cette lutte entre mon corps et
l'esprit pur,
Naît bientôt un lâcher-prise :
l'acceptation étonnée
De mon être d'ombre et de lumière.
Mon âme sort grandie de cette terrible
expérience,
Et m'habite tout entier de son corps
glorieux.
La paix surgit en moi comme une mer sans
ride
Où vogue maintenant un vaisseau démâté.
Et, de cette nuit nuptiale et
maternelle
Écoute le jour nouveau qui
surgit.
Voici que mon âme a épousé l'esprit.
Cependant, une voix chuchote dans mon
for intérieur :
" Dis-moi veilleur, où en est la
nuit ?
Dis-moi veilleur, où en est la nuit ?
- Le matin vient, et après le jour, et
après la nuit."
Dénoue la corde à nœuds de tes
réincarnations successives.
Affranchis-toi de la dualité du
bonheur et du malheur,
Libère toi, d'instant en instant, de
l'alternance du clair-obscur,
Et pour toujours de la vie et de la mort
Et de la mort et de la vie qui sans
lasse s’enlacent.
Unis en toi le Soleil et la Lune.
Alors tu retrouveras en silence
l’Éternité !
Tu seras enfin arrivé aux confins de la
Délivrance
Et la vacuité sera pour toi devenue
réalité.
Mais saches d'abord discerner dans les
ténèbres du Nord,
La lueur furtive et vacillante de
la Sainte Lucie.
Mais voilà qu'un enchantement se
produit :
La Saint Jean d'hiver et la Saint Jean
d'été se marient.
Et je n'ai plus, ô mon Dieu, qu'un seul
visage
Ne regardant ni derrière, ni devant,
mais en face
Le Soleil noir de minuit.
Je suis Celui qui suis.
Je suis l'éternité en marche,
Ici et maintenant.
Noël ! Éveille en ton sein une
nouvelle espérance,
Ce jeune Soleil renaissant qu'on appelle
l'apprenti.
Sous la voûte étoilée, des hommes
sont assis rassemblés,
Sur les vestiges silencieux d'un temple
effondré.
Au loin, deux colonnes creuses dans le
vent
Laissent parfois sortir des mots
énigmatiques.
Elles servent de bornes à la ronde des
temps
Conservant en leur sein archives,
géométrie et musique.
L'une, de brique rouge, flottait lors du
déluge,
L'autre, de marbre blanc triomphera du
feu!
A quoi songent ces hommes dans le soir
Qui descend ? L'un dit : "Tout est
de glace, tout est noir".
L'autre s'inquiète : "La vie
reviendra-t-elle ?
Et avec elle le jour ? La lumière est
si belle
Et si chaud le soleil aux rayons
mordorés !
Comment pourrait-il en une nuit sombrer
?"
Oui ! Une fois encore, le soleil
resterait invaincu.
Il suffisait de conjurer le destin
pour aider
Cet astre aux fumerolles
phosphorescentes
A reprendre victorieusement sa course
étincelante
Au terme de cette nuit si lente et
si menaçante.
Alors, le plus vieux des hommes suggéra
Le recours à une vieille pratique
magique.
Un simple feu de bois pourrait ramener
la joie.
L'heure était propice et le lieu
magnétique.
Le Verbe éternel, encore enfoui
Serait, on le savait, exhumé cette
nuit.
Il détenait encore sa Force potentielle
Qui par le miracle de l'Amour
Allait le faire éclore en plein ciel.
Autour du brasier devenu incandescent,
Les hommes de la nuit s'étaient réunis.
Tous se tenaient la main pour faire une
longue chaîne.
Un secret les unit : ils ne connaissent
point la haine.
Ils sont tous frères, ils sont tous
unis
Devant la mort, devant la vie.
Tout-à-coup, des chants s'élèvent ou
loin.
La liturgie des rondes de Noël a
commencé.
Les frères psalmodient des
antiennes
Sur l'Épiphanie du Christ ressuscité.
" 0, Orient, splendeur de la
lumière éternelle,
Soleil de Justice, viens éclairer ceux
qui sont assis
Dans les ténèbres et dans les ombres
de la mort."
"Déjà l'Orient s'allume, déjà
voici les signes précurseurs,
Déjà notre Dieu vient nous inonder de
sa lumière."
" La terre était
plongée dans les ténèbres,
L'Orient du Seigneur est sur toi, il est
apparu en toi..."
Et je les écoutais chanter, pensant
avec ferveur :
Le Christ qui reverdit à présent en
moi,
M'exonère peu à peu de ma foi.
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