Soulever le voile d'Elias Artista
Après La Franc-maçonnerie comme voie d’éveil (2006) et Masque, manteau et silence, le
martinisme comme voie d’éveil (2008), Rémi Boyer signe le troisième et dernier volet de son
triptyque consacré à l’initiation occidentale : Soulever le Voile d’Elias Artista. La Rose-Croix
comme voie d’éveil. Une tradition orale, dans la collection « L’Esprit des Choses » des Editions
Rafael de Surtis (7, rue saint-Michel, 81170 Cordes-sur-Ciel).
Ce nouvel essai postule une « initiation au Jardin », propre à la Rose-Croix et distincte de
« l’initiation dans la Cité », à laquelle se rattacherait la franc-maçonnerie. J’ignore si cette
distinction a un sens au regard de l’histoire des sociétés, réputées rosicruciennes, depuis les
origines, d’ailleurs encore partiellement obscures, de la tradition rosicrucienne, alentour 1610.
J’ignore aussi si la Rose-Croix tient, comme l’écrit Rémi Boyer, à la conscience non-duelle, tandis
que d’autres formes d’initiations relèveraient plutôt, elles, d’une expérience duelle.
Mais la distinction originale, qui n’est d’ailleurs pas une opposition, posée par Rémi Boyer,
entre initiation dans la Cité et initiation au Jardin, dépasse le cadre d’une approche historique et
témoigne avant tout d’une expérience, à la fois personnelle et collective, en rapport avec un collège
interne : l’Ordo, fondé en 1992. Or, ce collège est en droit d’être considéré – j’en suis convaincu
sans y avoir jamais appartenu – comme incarnant une Rose-Croix que seul l’insaisissable Elias
Artista, l’ange tutélaire des rose-croix cher à Guaita, Sédir, Ambelain, est à même d’authentifier,
parce qu’il souffle sur qui il veut, quand et où il veut.
Du reste, depuis un certain après-midi passé au jardin du Luxembourg – je venais d’avoir 20
ans -, je sais aussi, d’expérience, que l’initiation au Jardin est une réalité, une initiation au Jardin qui
est, comme l’écrit Rémi Boyer « un art du tissage, du maillage, de la trame, de la créativité, de la
mutation et de la traversée des formes ».
Quant à la question de savoir ce qu’est la Rose-Croix, Rémi Boyer propose une réponse
documentée, non pas, encore une fois, en vertu de filiations historiques illusoires, mais en fonction
d’éléments et de traditions orales qui illustrent la permanence de certains courants, à rattacher à une
« Rose-Croix méditerranéenne » opérative, porteuse de certains arcanes d’une alchimie interne.
Lima de Freitas, qui veilla sur l’Ordo, comme du reste Robert Amadou de 1992 à 2002,
explore ensuite le mythe fondateur et le tombeau de Christian Rosenkreutz à la lumière de textes de
Fernando Pessoa. Enfin, l’ouvrage se clôt par un conte chevaleresque et alchimique : « les
Mémoires de Rossinante », qui offrent une lecture initiatique du Don Quichotte de Cervantès.
Ce nouveau livre de Rémi Boyer, étrange et mystérique, remplit bel et bien la promesse de
son titre, et c’est là l’essentiel, en se plaçant sous le patronage et en soulevant le voile d’Elias
Artista.
Serge Caillet
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